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Le Blog de l'association de la Famille Debuiche
26 juillet 2010

Les DEBUICHE de Blangy d'après les recensements de population (1820-1896)

 

Les DEBUICHE de Blangy d'après les recensements de population (1820-1896)

 

 

De tout temps, dans l'Antiquité , à Rome aussi bien qu'en Chine, les gouvernements ont eu la volonté et ont compris l'intérêt militaire et fiscal, de dénombrer les populations. Louis XIV, par son ordonnance de St Germain en Laye, prise en 1667, recommande d'établir un double du registre paroissial à des fins de dénombrement de la population. Sous l'Ancien régime, les listes sont exprimées en feux, c'est-à-dire en foyers, notion qui disparaît en 1790. Mais il existe peu de recensements sur l'ensemble du territoire à cette époque. Il faut attendre le début du XIXè siècle pour qu'il soit décidé d'en pratiquer tous les cinq ans. Ce sera le cas jusqu'en 1946, sauf pour quelques années retardées ou supprimées du fait des guerres.

 

 

La mise en ligne des recensements de population, au début de cette année 2010, par les Archives du Pas-de-Calais m'a donné l'idée du travail que nous vous présentons aujourd'hui sur l'implantation de notre famille dans Blangy. Ces recensements constituent une série complète, sauvegardée et commençant en 1820. Rien ensuite jusqu'en 1831, date à partir de laquelle ils deviennent quinquennaux, à l'exception de l'année 1872 où nous enregistrons un retard d'une année dû sans doute à la guerre de 1870 et aux événements révolutionnaires de 1871. Il faut attendre 1841 pour trouver à Blangy les indications de rue dont les noms vont se modifier quelque peu au cours des temps (présenter le plan de Blangy-sur-Ternoise avec les indications de rues données par le plan cadastral de 1825) . En 1851, la religion et les maladies sont indiquées. On devine l'intérêt d'un tel document pour qui fait de la généalogie: repérer ses ancêtres dans une commune à une date donnée avec la famille qu'ils ont pu fonder, leur profession, leur parenté etc. A noter également que les recensements de 1861 et 1866 sont intéressants pour l'histoire du village lui-même. En 1861, sur les 198 maisons, 154, soit les 3/4, sont couvertes de chaume, et 44 de tuiles ou d'ardoises; 190, presque la totalité, n'ont qu'un rez-de-chaussée; 8 un rez-de-chaussée et un étage. On rencontre encore aujourd'hui dans le village, ce type de maison, blanchie à la chaux, comme celle des arrière-grands-parents sur la route d'Erin que nous avions repérée en 2003. En 1866, le nombre de maisons a crû de 9 pour 16 habitants de plus: 151 en chaume, et 56 en tuiles et ardoises; c'est une donnée enregistrant un début d'évolution vers une couverture de maisons "en dur". Dans ces deux mêmes recensements, il est dressé un tableau des professions. Leur répartition ne change guère de 1861 à 1866. Prenons comme référence le tableau de 1861: il n'y a que 3 propriétaires, vivant "sur leurs terres qu'ils ont affermées". A quoi s'ajoutent, en 1866, 4 propriétaires "faisant valoir". 77 fermiers cultivent la terre d'autrui moyennant une redevance, aidés de 26 domestiques et de 8 ouvriers agricoles à l'année. Le gros des actifs blangiaquois est formé de 186 journaliers. Parmi ceux-ci, se trouvent sans doute les ménagers, qui, bien qu'ils soient propriétaires de quelques lopins de terre, n'ont pas assez de revenus pour en vivre et se louent à la journée. 7 travaillent le bois (scieurs, tourneur, bûcherons, puis en 1866, 5 menuisiers-charpentiers). 15 cabaretiers, 4 épiciers, 1 médecin, 1 instituteur, 1 garde-champêtre, 1 curé, 10 rentiers et quelques autres...Notons que les agriculteurs au sens large représentent les 3/4 des actifs.

 

Mais revenons au premier recensement, celui de 1820. Le préfet du Pas-de-Calais SIMEON en est la cheville ouvrière . Précédemment, en 1815, une tentative de recensement eut lieu dans le Pas-de-Calais mais elle avorta, si bien que c'est "le tableau de la population des communes du royaume, approuvé en 1806" qui fait toujours foi, mais comme le dit le préfet, il fait date et il est devenu nécessaire de "procéder au dénombrement exact de la population".Les maires auront à disposition un modèle qu'il leur joint; "Vous aurez soin, leur dit-il, d'y comprendre tous les individus de tout âge et de tout sexe, habitans ou domiciliés dans la commune, même ceux qui en sont absens pour raison de service militaire ou tous autres motifs; d'établir votre état nominatif par ménage, en portant, en tête de chaque ménage, le chef de famille, puis sa femme, ensuite ses enfans, puis les aïeux ou autres parents faisant partie du même ménage, puis enfin (sic) les domestiques". Le travail étant ainsi cadré pour 1820, Albert BOUTIN , maire et fermier, commence par lui-même, prenant soin de noter la date de naissance des Blangiaquois, ce qui ne se fera plus, ses successeurs se contentant d'indiquer leur âge.

 

En 1841, les ménages sont classés d'après la rue qu'ils habitent, ce qui donne une cohérence aux relevés et peut-être évite les oublis. Seul changera par la suite avec le nom des rues l'ordre de "passage" des rues. J'ai donc pu travailler sur les 15 recensements qui s'échelonnent de 1820 à 1896 sur plus de 400 pages.

 

La population du village oscille entre 920 habitants en 1846 et 757 en 1896 si on ne prend pas en compte le pensionnat de Blangy dont les effectifs varient de 40 à 91 personnes. La hausse est constante entre 1820 et 1846 et malgré deux reprises, la baisse l'est aussi jusqu'en 1896. Les DEBUICHE représentent de 40 personnes en 1841 et 1851 à 27 en 1886, soit de 4,43 % à 3,15 %. Quant au nombre de foyers DEBUICHE , ils passent de 15 en 1831, 1841 et 1866 à 8 en 1820 et 1891. Rappelons-nous pour comprendre ces chiffres que c'est au XIXè siècle que "l'émigration" commence pour les différentes branches que nous représentons. On peut distinguer trois vagues ou vaguelettes dans ces départs de Blangy:

- La première, même si elle dépasse le cadre de cette étude, est portée par Charles Joseph Toussaint qui fonde une famille au Parcq à la fin du XVIIIè siècle. La branche s'éteindra au XIXè, au moins en ligne directe.

- La deuxième concerne le milieu du XIXè. Nous prendrons trois exemples pour l'illustrer.

1 Martial Joseph, né en 1837, domestique à Amiens, épouse une fille de Maisnil . Il décède à Aubigny-en-Artois dont la postérité est ici présente.

2 Hector, né en 1840, épouse une fille de Blangy et décède à Eclimeux en 1912. Son fils Emile, né à Blangy en 1869 aura une fille Marthe, née à Calais en 1895, dont on connaît la postérité ici présente. Son dernier fils Marcel, né à Brimeux, est l'auteur des DEBUICHE charcutiers de Boulogne-sur-Mer.

3 Edouard Jean Baptiste, né en 1844, employé aux Contributions indirectes, décède à Hézecques dont on connaît la postérité dans le Nord. C'est un fils aîné qui a bénéficié, par l'accès à des études, d'une promotion professionnelle, alors que son cadet -nous y reviendrons- reste au village.

- La troisième vague, de loin la plus grosse, concerne les enfants nés dans la deuxième partie du XIXè et plus précisément dans le dernier quart du siècle. Nous donnerons cinq exemples:

1 Charlemagne, né en 1862 , brasseur, décède à Auchel en 1891. C'est l'auteur de la branche de Guarbecque, très féconde.

2 Pierre Charles, né en 1871, épouse à Calais Marie Louise CATTOEN . La postérité est inconnue.

3 Alfred, né en 1874, s'établit boulanger à Auxi-le-Château où il décède en 1954 . La branche n'est pas éteinte.

4 Christine, née en 1878, se marie à Boulogne-sur-Mer en 1899 avec Victor CREPIN dont la postérité est bien connue.

5 Quant aux descendants de Charles et Zélie LHOMME, sur leurs 14 enfants, il n'y aura à Blangy que trois mariages et un seul décès (en dehors des enfants décédés en bas âge), celui de Paul en 1915. Calais, Boulogne, Le Havre, Rouen, la Somme, l'Aisne, la Rochelle, Tremblay les verront vivre et se mutiplier.

 

Nous passons sur les cas de Magloire et Louis, deux frères, quittant Blangy, le premier pour s'installer à La Madelaine et le second à Fresnoy (postérité). Ou encore Ange Philémon travaillant à Paris en 1848 et dont nous perdons la trace. Au XXè siècle, la déperdition sera encore plus grande et jusqu'à ce mois de juin 2010, il n'y avait que Jacques pour réprésenter tous ces couples qui ont vécu ici, modestement pour la plupart.

 

Mais venons-en à ceux qui ont affronté l'adversité dans le village de leurs ancêtres et dont nous suivons le parcours dans les recensements. Comme nous l'avons dit, les rues qu'ils ont habitées sont indiquées dans les documents de travail à partir de 1841 . Nous allons suivre plusieurs couples pour étudier leur évolution.

 

Tout d'abord, intéressons-nous à Pierre Joseph (1) marié à Emélie LHUITTRE, un couple observable de 1841 à 1896. Mariés en 1837, ils habitent rue de Tilly en 1841 avec leurs trois enfants. Pendant 25 ans, ils y demeurent et au décès de son épouse, Pierre Joseph est recensé rue de Grand Marais, chef de famille de cinq enfants. En 1871, il est rue de Courcelles à Tilly et il héberge sa grand-tante de 93 ans, Marie Anne (2). De 1876 à 1896, il est toujours rue de Tilly, mais ses conditions de vie changent à chaque recensement. En 1876, trois enfants forment avec lui le ménage; en 1881, il vit avec sa fille aînée Charlotte, âgée de 43 ans et un domestique. En 1886, âgé de 70 ans, c'est Julia (29 ans) qui vit avec lui. Au recensement suivant, grand changement, il a abandonné à son fils Jules la qualité de chef de famille. La situation ne variera pas jusqu'à son décès en 1898, à l'âge de 82 ans.

 

De Pierre Joseph, nous passerons à l'examen de ses propres parents. Pierre Joseph Bernard (3) décède en 1853 et son épouse Marie Françoise LHOMME quatre ans plus tard. Nous les trouvons en 1841 rue de Fruges avec leur fille Elisabeth. En 1846, ils sont toujours route de Fruges avec leur petite fille Elise CRETEL. En 1851, ils ont déménagé et vivent seuls Grand'rue au n° 13, mais au 14 leur fille Elisabeth (4) vit avec son mari Charles HAINAUT et au 15 c'est leur fils Jean Baptiste (5), sa femme Julie DELEPINE et leurs cinq enfants que nous trouvons. Le couple âgé qui ne vit pas dans la toute proximité de leur fils cadet Pierre Joseph (le premier examiné) est en fait très entouré de deux enfants mariés avec leur propre descendance. Mieux encore, leur fille Marie Anne (6), mariée à Albert BRANLY, habite la même Grand'rue au n°11. Les solidarités familiales peuvent s'exercer facilement dans un petit périmètre, tout en préservant l'indépendance, l'autonomie et l'intimité de chacun.

 

Suivons maintenant le couple Jean Baptiste et Julie DELEPINE (5), nos trisaïeuls. Nous venons de les rencontrer en 1851 Grand'rue. Ils se sont mariés en 1833, ont deux enfants et vivent avec les beaux-parents de Jean Baptiste et un beau-frère, maçon. Au recensement suivant, Jean Baptiste est marchand épicier, rue de Maisoncelle et la famille compte toujours deux enfants et Joseph DELEPINE, son beau-père, veuf, vit sous le même toit. En 1846, la situation a changé: il est devenu journalier et a déménagé à côté de ses parents route de Fruges. Nous comptons deux enfants de plus et le beau-père est décédé. Cinq ans après, il renoue avec les affaires puisqu'il est cabaretier Grand'rue n°15 et ses parents l'y ont suivi au n°13. Nouveau changement en 1856, où nous le trouvons ménager rue de Tilly à Courcelles. Il y restera jusqu'à son décès en 1880. Nous observons que les changements d'activité de Jean Baptiste entraînent des changements de résidence et curieusement, sans que nous en ayons une explication nette, le couple Charles HAINAUT-Elisabeth, et avec eux Marie Françoise LHOMME , veuve de Pierre Joseph Bernard (3), ont quitté aussi la Grand'rue et vivent non loin de là, dans la même rue de Tilly à Courcelles dès 1856. En 1881, la veuve de Jean Baptiste, Julie DELEPINE, est recensée rue d'Hesdin dans la maison de son fils Charles époux de Zélie LHOMME (7). Il semble bien qu'une mère veuve et âgée ne puisse rester seule et que là encore nous voyons à l'oeuvre les solidarités familiales.

 

Mêmes solidarités dans le couple DEBUICHE-LHOMME (7) que nous venons de rencontrer: mariés en 1874, Charles est couvreur de paille et Zélie modiste; ils sont rue d'Hesdin n°70. Les parents de Zélie, Charlemagne LHOMME et Amélie LANVIN (8) sont cabaretier et boulangère rue d'Erin avec quatre de leurs 14 enfants en 1872. En 1876, ils sont route d'Hesdin au n°67 où Charlemagne est boulanger. Restent avec eux deux filles qui ne se marieront pas, Joséphine et Aglaé, et une petite-fille. En 1881, tout ce monde est réuni aux 80 et 81 rue d'Hesdin, Charlemagne, débitant, vit avec sa femme, ses deux filles et deux neveux; Charles, désormais cantonnier, et Zélie sont à la tête d'une troupe de cinq enfants. En 1886, au même lieu, Charlemagne LHOMME est désormais veuf, âgé de 82 ans. Il est déclaré cultivateur, ce qui laisse rêveur. Il est toujours entouré de ses deux filles, mais aussi d'Angèle LEFEBVRE, nièce de Zélie, âgée de 15 ans, dont la mère Angéline est décédée à la naissance de l'enfant. Tout à côté, sont recensés Charles et Zélie LHOMME, leurs huit enfants et -nous l'avons dit- Julie DELEPINE, mère de Charles. Cinq ans plus tard, en 1891, après le décès du père de Zélie et de la mère de Charles, le couple a déménagé rue d'Erin et n'a pas chômé puisque c'est douze enfants qui les égaient. Elisée, l'aîné, 16 ans, est déjà clerc de notaire. Charles et Zélie élèvent aussi un enfant de l'hospice âgé de trois ans. Joséphine et Aglaé LHOMME, les soeurs de Zélie, les ont suivis rue d'Erin et sont leurs voisines les plus directes; Angèle LEFEBVRE, la nièce, les accompagne. Le décès de Charles DEBUICHE en 1893 bouleverse cette donne: en 1896, Zélie, veuve à 37 ans, avec 13 enfants, ne peut compter que sur les deux aînés qui travaillent, Elisée ouvrier et Paul cantonnier. Mais à côté, il y a toujours ses deux soeurs et sa nièce auxquelles s'est joint un Henri LEBRUN, 28 ans, facteur rural, qualifié de neveu, qui a épousé Angèle LEFEBVRE en 1891. Il y a deux ans, nous avons évoqué la situation de Zélie LHOMME et nous n'y reviendrons pas. Précisons que pour élever ses enfants, elle peut s'appuyer sur l'aide de ses soeurs; de sa nièce et quand il était temps, elle pouvait elle-même apporter son aide à son père, et à sa belle-mère. A chaque étape du parcours, nous avons constaté la vivacité des liens qui unit les générations. N'imaginons pas cependant une vie idyllique car les revenus sont très modestes et la mort soudaine de Charles a dû être cruelle pour sa famille.

 

Autre cas, celui de Charles, couvreur de paille, marié en 1830 à Marie Berthe LHOMME (9), une soeur de Charlemagne (restons en famille). Le père de Charles, Alexis (10), garde-bois, est décédé en 1830 et sa veuve, Rosalie GAULIN, réside en 1831, probablement rue de Maisoncelle avec sept enfants. C'est là que nous la trouvons avec trois enfants en 1841, dernier dénombrement où nous avons sa trace. Charles (9), le seul fils qui reste à Blangy, est installé non loin de là, rue de Marais avec sa femme et leurs trois enfants. Ils sont absents du recensement de 1846, et en 1851, ils sont rue de Courcelles avec les mêmes trois enfants. En 1856, ils sont recensés rue de Tilly à Courcelles avec deux enfants et un petit-fils adultérin, né l'année précédente. De 1861 à 1872, les enfants sont mariés, et le couple héberge un beau-frère de 60 ans, Jean-Baptiste LHOMME. Charles décède en 1876 et n'est pas mentionné la même année dans le document nominatif . En 1876, Marie Berthe LHOMME, chef de ménage et veuve, vit avec son frère Jean-Baptiste, qualifié de mendiant, âgé de 80 ans. (La qualification de mendiant s'explique par l'absence de ressources propres de l'individu à une époque où la retraite n'existe pas, ne l'imaginons pas traînant dans les rues en quête de nourriture). A partir de 1881, elle vit seule au même endroit jusqu'à son décès en 1893, à l'âge de 85 ans. Pourtant elle ne figure pas dans la liste nominative de 1891, ce qui fait penser qu'elle est depuis quelque temps à l'hospice de Blangy, bâti en 1890, qui accueille cette année-là, 1891, 17 pensionnaires dont le nom n'est pas donné. Les enfants de Marie Berthe LHOMME ayant migré ou étant décédés, nulle solidarité familiale ne peut s'exercer. Vraisemblablement, la solidarité villageoise prend le relais grâce à l'établissement public.

 

Rue de Courcelles, en 1841, habitent aussi Stanislas, journalier, et son épouse Adélaïde DECROIX, fileuse (11) , mariés en 1828, et leurs quatre enfants. En 1836, ils sont recensés avec deux enfants dans le ménage de Bernardine BROCVIELLE (12) , veuve de 71 ans. En 1831, Bernardine, déjà veuve de Norbert Romain, vit seule avec l'une de ses filles Prudence (16), dont nous reparlerons, mère d'Alexandrin, son enfant naturel âgé d'un an qui n'est pas né à Blangy. En 1846, c'est route de Fruges que nous retrouvons Stanislas et Adélaïde avec quatre enfants. Non loin d'eux, sont installés son frère Norbert et Henriette RATEL, son épouse (14) . Nous reparlerons d'eux après Prudence. Pas de changement en 1851, ses enfants ont de 8 à 20 ans. En 1856, Norbert est domestique et deux enfants demeurent avec leurs père et mère. Rien ne change jusqu'en 1866, où leur fille Sophie est mère célibataire de Stella, âgée de 6 mois. En 1872, Stanislas est décédé depuis deux ans et Adélaïde, 77 ans, mendiante, est chef de ménage . Elle accueille Ildefonse, son fils de 30 ans, marié à Dalila LAGACHE (13) . Elle meurt la même année 1872. Ici aussi, nous constatons les solidarités et la tolérance à l'égard des filles-mères qui continuent à vivre sous le toit des parents avec leur progéniture. Nous avons noté qu'à Blangy, certains foyers hébergent des enfants abandonnés, recueillis et placés par les hospices de Paris. Comment penser que des familles non-bourgeoises rejettent et laissent à l'abandon les enfants naturels de leurs propres enfants? Ildefonse et Dalila, quant à eux, vivront rue de Courcelles, seuls, sans enfant installé à Blangy.

 

Voyons Prudence (16) dont le destin est singulier. Nous venons de la croiser habitant, en 1831, chez sa mère avec son fils "adultérin". Cinq ans plus tard, elles a acquis son indépendance et vit avec deux enfants naturels, Sigifroy , 4 ans et Adolphie, 2 ans. En 1841, rue de Courcelles, elle est qualifiée de femme postiche, femme postiche de Ferdinand VARLET, ce qui ne manque pas de nous interpeller. Postiche? Littré nous apprend que le mot désigne familièrement "quelque personnage qui n'a pas la qualité qu'il se donne" et de citer un seigneur postiche dont parle le Duc de Saint-Simon dans ses Mémoires. Pour ce qui nous concerne, l'explication arrive quand nous découvrons que Marie Anne DEBUICHE (2) est la femme légitime du fameux Ferdinand VARLET. Elle vit même rue, à quelques encâblures du faux couple! En consultant la généalogie, nous nous apercevons que Marie Anne dont nous avons parlé tout à l'heure et qui vivra jusqu'à 96 ans, n'est autre que la cousine issue de germains ( de presque vingt ans son aînée) de Prudence! Quand nous parlions de tolérance! En 1846, les mêmes habitent aux mêmes endroits. Mais en 1850, Ferdinand décède et Prudence, manouvrière en 1852, vit seule rue de Bas. Ses enfants Sigifroy, 21 ans et Adolphie, 18 ans, qu'elle reconnaît la même année, ont quitté le nid. En 1856, Prudence est toujours à Blangy. Mais en 1857, nous trouvons sa trace à Roubaix pour la perdre à nouveau.

 

Frère de Prudence, Norbert (14), ménager, épouse, en premières noces, Marie Anne BEUGIN, une plisseuse originaire de Fruges qui mourra prématurément en 1833, lui laissant cinq enfants. Remarié l'année suivante avec Henriette RATEL qui lui donnera quatre enfants, il est installé en 1841 rue de Courcelles (qui est en passe de devenir la rue des DEBUICHE) où il habitera jusqu'à son décès en 1856. Sa veuve y reste dix ans de plus avec ses deux plus jeunes enfants. Elle disparaît des recensements postérieurs. Sans doute a-t-elle suivi l'un de ses enfants hors de Blangy. Son décès survient en 1891 à Aubigny-en-Artois, chez son fils Martial Joseph, sans qu'elle ait été portée au préalable sur les listes nominatives de cette commune. Au total, un couple stable dont les enfants partent au fur et à mesure qu'ils grandissent et une veuve qui achève sa vie chez un fils dans une commune d'adoption.

 

C'est aussi le cas du couple Charles et Marie Berthe FARSY (17). Charles, fils aîné de Pierre Joseph Bernard et de Marie Françoise LHOMME, est maréchal-ferrant. Il se marie en 1828 avec Marie Berthe FARSY dont le père est aussi maréchal. En 1831, à 26 ans, il est chef de ménage, le couple a un enfant et un domestique. En 1836, le cercle familial s'agrandit avec quatre enfants. 1841 le donne installé rue de la Place où, pendant 20 ans, il exerce son métier. Seule, la dénomination de la rue change: Grande place, puis rue de la grande place. Ils n'auront pas plus de cinq enfants au foyer et le nombre tombera naturellement à deux en 1861. A cette date, il est ménager. Ce qui surprend. Tentative d'explication: son fils aîné, André Joseph, marié à Emélie ASSELIN (18) en 1857, curieusement appelé Charles sur la liste de 1866, est lui aussi, maréchal-ferrant. Nous pouvons penser que c'est la transmission du métier qui explique la quasi-retraite de Charles et son activité de ménager. André, qui, en fait, se fait appeler Joseph, très tôt veuf avec six enfants, est toujours rue de la Place en 1896. Mais que deviennent Charles et Marie-Berthe FARSY (17)? Ils sont absents du recensement de 1866! Où les chercher? C'est l'occasion de se souvenir que leur fils aîné, un autre Charles, a fait des études (marque d'aisance de la famille), est entré dans les ordres puis est devenu curé de Molinghem, près d'Aire-sur-la-Lys, à trente-trois kilomètres de Blangy. C'est là que nous les retrouvons, rentiers dès 1866, avec leur fille Charlotte, âgée de 28 ans, sans profession. Pendant plus de vingt ans, ils resteront près de leur fils et décéderont en 1888 et 1889. Peu auparavant, en 1885, ils auront perdu leur fille célibataire. En 1881, au foyer s'est ajoutée leur petite-fille Berthe, fille de Joseph, âgée de 18 ans. Et, en 1886, à côté de chez eux, rue de l'église, comme de bien entendu, vit Charles BOURGERY, 32 ans, avec femme et enfants, qui est forgeron et chez qui travaille comme forgeron également un autre Charles, Charles DEBUICHE, âgé de 22 ans, petit-fils de Charles et Marie-Berthe FARSY et fils de Joseph qui, lui, est resté à Blangy comme nous l'avons dit. Mais devinez qui est ce Charles BOURGERY? C'est le fils de François, garde-moulin à Blangy et de Julie DEBUICHE (20), elle-même fille de Charles et Marie-Berthe FARSY (17)! Charles BOURGERY est donc le petit-fils de nos rentiers de Molinghem. Charles et Marie-Berthe ont reformé un foyer, attirant à eux une parentèle, la faisant bénéficier de leur expérience et de leur art, entourant leur fils curé de leur présence assidue et sans doute réconfortante, dans le même temps de leur grande vieillesse où ils ont pu compter sur le dévouement de toute la famille qu'ils avaient réunie autour d'eux. En 1896, à Molinghem, la situation est plus traditionnelle; le curé, âgé de 66 ans (âge de son décès d'ailleurs) n'est plus entouré que de sa servante. Les BOURGERY ont quitté le village et sont allés vers d'autres cieux. Mais ceci est une autre histoire et d'autres recherches à faire par les BOURGERY...

 

Voilà brièvement exposé ce que peut réserver l'exploitation de ce type de document. Nous avons écarté délibérément certains couples qui n'apparraissent qu'en fin de siècle et nous n'avons pas suivi toutes les filles portant le patronyme DEBUICHE, ce qui nous aurait entraîné dans des développements encore plus complexes. A condition de connaître le contexte familial et d'avoir déjà récolté des éléments sur les liens de parenté, nous disposons là d'une source documentaire intéressante et complémentaire qui aide à comprendre le fonctionnement des familles du XIXè siècle, à une époque où les témoignages transmis oralement sont devenus rares et plus rares encore les écrits, surtout de la part de familles qui vivent proches les unes des autres et qui ne maîtrisent l'écriture que dans les dernières générations du siècle.

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